Avec 31 défaillances de magasins d’optique lors des 9 premiers mois de 2021 contre 32 sur la même période l’année dernière, la stabilité des dernières données d’Altares confirme que votre secteur se porte bien. Des résultats à analyser avec prudence, toutefois, notamment en vue du remboursement des aides Covid et des PGE.

Bien Vu a interrogé Thierry Millon, directeur des études Altares Dun & Bradstreet, spécialisé dans l’information sur les entreprises.

Lors du 3e trimestre 2021, 14 défaillances de points de vente d’optique ont été constatées en France, contre 15 en 2020 lors de la même période. « Cela confirme que les tendances sont bonnes pour le secteur, mais il faut considérer les mois estivaux avec prudence, en raison des vacations judiciaires et des audiences moins nombreuses », prévient Thierry Millon. Faut-il s’attendre pour autant à une envolée des procédures d’ici la fin d’année ? « Non, car les fondamentaux du marché restent solides, avec un modèle viable, des marges en général suffisantes et des dépenses fixes maîtrisées et prévisibles, assez peu sensibles aux variables comme l’augmentation actuelle des frais de transport et d’énergie mondiaux », poursuit l’analyste.

« Pas d’envolée des procédures à prévoir d’ici fin 2021 en optique, compte tenu de la solidité des fondamentaux du marché et de sa faible sensibilité aux variables économiques actuelles »

Pour autant, plusieurs indicateurs poussent à la prudence. « Représentant 23% des procédures en 2021 et 17% en 2020, contre environ 33% tous secteurs confondus, les redressements et les sauvegardes restent trop rares pour les magasins d’optique », déplore Thierry Millon, qui y voit un manque d’anticipation des PME en matière de suivi économique et de « capacité à se réinventer face aux difficultés ».

Evolution des redressements et des liquidations de magasins d'optique entre 2016 et 2021
Sauvegardes de magasins d'optique et % par rapport aux procédures entre 2016 et 2021

Agir, plus que réagir face aux difficultés

En cas de bilan annuel décevant, et a fortiori quand les « années difficiles s’enchaînent », l’analyste conseille aux opticiens d’échanger régulièrement avec leur expert-comptable, pour faire des « points réguliers sur l’endettement, la trésorerie et la marge de l’entreprise ».
« Il n’est pas aisé d’avoir du recul sur sa société, a fortiori quand on met les mains à la pâte, comme beaucoup d’opticiens propriétaires de structures de moins de 5 salariés. C’est pour cela qu’il est toujours nécessaire d’avoir un regard extérieur, impartial et documenté », poursuit Thierry Millon.

« Bien identifier les causes des difficultés, contextuelles et structurelles, et faire des points réguliers sur l’endettement, la trésorerie et la marge »

« Le manque de trésorerie est-il lié à des factures non encaissées, à des dossiers Ocam en retard ou à un manque durable d’ordonnances ? Ma zone de chalandise est-elle toujours bien activée ou mes concurrents me font-ils de plus en plus d’ombre ? Parfois, il vaut mieux réinvestir pour se relancer, quitte à s’appuyer sur un prêt bancaire, obtenu après présentation d’un dossier solide, avec le concours de l’expert-comptable… D’autant que le remboursement des PGE à compter d’avril 2022 va poser des difficultés aux magasins non rentables », remarque-t-il.

Pas de profil « type »

Et si l’endettement est trop important, la rentabilité trop entamée, reste la possibilité du redressement judiciaire. « Salaires pris en charge par l’Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, planification à long terme, 10 ou 12 ans, du remboursement de la dette… Il vaut mieux parfois admettre son échec à court terme pour préserver ses chances de relance à long terme », conclut Thierry Millon, qui rappelle la diversité des profils des magasins d’optique défaillants. En effet, lors du 3e trimestre 2021, 7 des points de vente touchés par des procédures ont entre 3 et 8 ans, les sept autres ayant entre 13 et 40 ans d’existence.