Alors que la rentrée se fait sous la menace d’un rebond de l’épidémie, l’optique continue d’afficher de bons résultats. Nous sommes pourtant loin d’en avoir fini avec le Covid-19. Les mesures sanitaires strictes ont été renforcées face aux inquiétudes suscitées par la circulation toujours active du virus dans de nombreux départements. Ces dernières portent tant sur la situation sanitaire du pays que sur l’évolution de la croissance et du pouvoir d’achat : selon un sondage réalisé par Odoxa-Dentsu Consulting*, fin août, une très grande majorité de Français (8 sur 10) exprime son pessimisme face à une 2e vague possible de l’épidémie et ses conséquences sur l’économie et l’emploi. Pourtant, les derniers chiffres publiés hier par l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) révèlent qu’après le net rattrapage constaté en mai et en juin, la consommation des ménages s’est maintenue pendant l’été à un niveau proche de celui d’avant-crise. Et l’institut prévoit que l’activité économique aura pratiquement comblé son recul d’ici fin 2020 (-4% environ par rapport à la période « normale »).

L’activité économique se situerait en fin d’année aux alentours de -4% par rapport au niveau d’avant-crise.

Source Insee, Dares, enquête Acemo-Covid, calculs Insee à partir de sources diverses – crédit Bien Vu

Avec une hausse de CA, qui, selon les verriers et l’ensemble de la distribution, se situe entre +10% et +15% pour les mois de juin et juillet et reste aux environs de 7% pour le mois d’août, l’optique se place parmi les secteurs qui ont rapidement renoué avec la croissance. Cette évaluation moyenne ne prend pas en compte toutefois les disparités existantes entre les différentes implantations de magasins, ceux des grands centres commerciaux ou situés à Paris rencontrant de véritables difficultés. Ces résultats expliquent en partie votre niveau de confiance pour les mois à venir : interrogés début septembre par nos confrères d’acuite.fr, vous êtes 31% à l’exprimer et un peu plus d’un tiers à n’envisager qu’un léger impact de la crise qui perdure sur votre activité.

« A l’inverse du pessimisme ambiant, les opticiens envisagent majoritairement les mois à venir avec confiance, au regard de la reprise bien meilleure qu’attendue »

Plusieurs facteurs peuvent pérenniser cette reprise meilleure que prévue. La mise en place du système de prise de rendez-vous dans bon nombre de vos magasins en est un : en fluidifiant la gestion des flux en point de vente et en personnalisant la relation avec chacun de vos clients, cet outil, imposé par les contraintes sanitaires, consolide la relance.

La hausse des renouvellements d’équipements en magasin sur la base d’ordonnances valides (Face au manque d’ordonnances post-confinement, les renouvellements en magasin sont en hausse) en est un autre. Là encore, les conséquences du confinement (arrêt des consultations) et le retour très progressif à la normale dans les cabinets d’ophtalmologie sont un activateur bénéfique des possibilités offertes par le décret Opticiens de 2016.

« La hausse des renouvellements avec adaptation chez l’opticien est le recours actuel pour contrebalancer la tension sur les prescriptions »

Car c’est bien là que sont l’oxygène actuel de la profession et le réservoir de croissance à même de pérenniser la reprise. La filière, opticiens, fournisseurs, orthoptistes et ophtalmologistes, ne s’y est pas trompée : en juillet, elle a confié à l’Asnav (Association nationale pour l’amélioration de la vue) le soin de développer un plan de communication pour informer le grand public de cette mesure qu’il ignore encore largement.

Pour tous les syndicats d’opticiens, augmenter le nombre de renouvellements d’équipement avec adaptation directement en magasin est également le sujet central de la rentrée.  « La tension sur les prescriptions retient toute notre attention désormais. Aujourd’hui, le renouvellement avec adaptation est le seul recours pour détendre le système, dans l’attente d’une solution sur le long terme et, en particulier, des conclusions de la mission Igas », souligne André Balbi, président du Rof (Rassemblement des opticiens de France).  Même analyse de Véronique Bazillaud, déléguée générale du Synom (Syndicat national des centres d’optique mutualistes) qui voit dans la possibilité ouverte par le décret de 2016 « la solution, déjà existante et indispensable pour réduire l’impact d’une baisse d’ordonnances émises par les ophtalmologistes ». Pour Yannick Dyant, président de l’AOF (Association des optométristes de France), « la période est effectivement le bon moment pour se saisir du renouvellement chez l’opticien tel qu’il a été défini et prévu par le décret Opticiens ».

« Le blocage de certains remboursements par les Ocam suscitent une inquiétude croissante »

A condition évidemment que les Ocam jouent le jeu. Ce qui semble loin d’être le cas. « Il y a actuellement des différences de traitement des dossiers par les complémentaires santé. Certains magasins se voient opposer des refus de remboursement des prestations d’adaptation, de renouvellement d’équipements sur la base d’ordonnances valides post-2017, etc. », affirme Alain Gerbel, président de la Fnof (Fédération nationale des opticiens de France). Ce blocage suscite de fortes inquiétudes chez la plupart d’entre vous. Et risque d’entraver l’une des poches de croissance dont vous disposez pour les mois à venir. Les discussions se poursuivent néanmoins entre Ocam, syndicats d’opticiens et pouvoirs publics. Prochaine étape le 15 septembre avec le Comité de suivi de la réforme qui, espérons-le, pourrait déboucher sur une feuille de route précise d’ici la fin de l’année.

* Enquête réalisée auprès d’un échantillon de Français interrogés par internet les 27 et 28 août 2020. Échantillon de 1 004 Français représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l’échantillon est assurée par la méthode des quotas appliqués aux variables suivantes : sexe, âge, niveau de diplôme et profession de l’interviewé après stratification par région et catégorie d’agglomération.

Marie-Dominique Gasnier, rédactrice en chef