Novembre 2025
Mensuel pratique et interactif de l’optique
Édito
Le PLFSS 2026 s’annonce comme un texte de rigueur, et une fois encore, devrait re battre les cartes pour l’optique. L’État veut rationaliser la dépense : le périmètre des contrats responsables serait réduit pour concentrer les remboursements sur les soins jugés “les plus efficaces”. Cette révision s’inscrit dans une logique plus large : limiter les postes de dépense périphériques pour inciter les Ocam à se concentrer sur les dé penses de médecine de ville et hospitalières, là où les besoins explosent.
En clair, certaines prestations — optique, dentaire, audiologie — pourraient voir leurs plafonds revus à la baisse. Voilà une mauvaise nouvelle pour les magasins déjà fragilisés… Car vous le constatez au quotidien, vos marges se contractent tandis que le nombre de points de vente continue d’augmenter.
Autre axe fort du PLFSS 2026, alors qu’il dé bute sa trajectoire parlementaire : la lutte contre la fraude (au sens large), est désormais érigée en priorité nationale. Le projet de loi prévoit la création de flux sécurisés d’échanges entre l’Assurance maladie et les Ocam pour mieux détecter incohérences et abus. Les sanctions seraient alourdies, et les complémentaires disposeraient d’un accès élargi aux données personnelles : actes, prescriptions, facturations. Une évolution qui pose à nouveau la question de la confidentialité et de la gouvernance de la “data” de santé.
Cette séquence ouvre aussi, paradoxale ment, une opportunité pour la filière optique : avancer ensemble sur ce sujet de la fraude, depuis trop longtemps source de suspicion et de reproches réciproques — du côté des Ocam comme de l’État. Or, là où il faudrait une voix commune, l’unité de filière fait dé faut. Deux initiatives de blockchain coexistent : celle du Rof, soutenue par quelques verriers de taille intermédiaire, qui entrerait en phase de test en janvier 2026 ; et celle de la Fnof, présentée à l’automne 2024 mais restée à l’état de prototype faute d’accord avec les industriels… En octobre, le Gifo rappelait que les fabricants “font de la lutte contre les abus une priorité”, comme pour répondre aux critiques des syndicats dénonçant leur inertie. Cette cacophonie est regrettable et contre-productive. En parallèle, la Fnof a proposé sa blockchain aux médecins comme outil de conformité sécurisé. Une démarche courageuse, mais aussi le symbole d’une filière isolée. Incapable de se fédérer.
Pendant ce temps, les réseaux de soins sont en passe de consolider leur position. L’ouverture prévue par le PLFSS 2026 concernant le partage de données entre l’Assurance maladie et les Ocam pourrait entériner leur rôle en matière de régulation du marché et de lutte contre la fraude. La solution de conformité de Santéclair, déjà opérationnelle pour certains flux opticiens- Ocam, leur servirait alors de bras armé… Au risque de renforcer leur tutelle vos magasins d’op tique. Définitivement ? Pour votre métier, mais aussi pour son attractivité, le danger est clair : une intermédiation croissante qui ferait de l’opticien un simple délivreur d’équipements, privé de marge de manœuvre commerciale et stratégique. Bref, si la nécessité d’une unité de filière ne fait plus débat, est-il encore temps ?



